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Dans mon chapeau...

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23 septembre 2009

Nan!

"Le déluge (Le retour à la terre, tome 4)" de Jean-Yves Ferri et Manu Larcenet
4 étoiles419X32ZDTNL__SL110_

Dargaud/Poisson pilote, 2007, 48 pages, isbn 9782205058147

Capucine est née le 20 décembre à l'aube, ou vers la fin du tome 3 du "Retour à la terre", c'est selon. Elle est très mignonne et ses parents sont très heureux. Mais nan! Ne pensez même pas à le demander: elle ne fait pas ses nuits. Et ses parents sont très heureux, oui, mais aussi un peu à cran à force de manquer de sommeil...

Bref, vous l'aurez compris, ce nouvel opus de la savoureuse et désopilante série de Jean-Yves Ferri et Manu Larcenet nous fait partager une nouvelle étape de la vie de Manu Larssinet et de Mariette aux Ravenelles: les bonheurs mais aussi les angoisses et les fatigues de deux jeunes parents. Leur difficulté à abandonner leur petite puce, ne serait-ce que le temps d'une séance de ciné, tout en la laissant aux soins d'une babysitter aussi digne de confiance que la mère Mortemont. Et leur difficulté aussi à décoder les borborygmes bizarres du babyphone...

La météo n'est pas toujours au beau fixe dans ce nouvel épisode: il pleut beaucoup et les amours de jeunesse de Manu et Mariette - Cristina Ignacio Tomata de Rosso y Peñas del Fandango de la cruz et Aymeric de Saintonge - repointent ici le bout de leur nez assez mal à propos et tout ça réveille les problèmes d'apnée du sommeil de Manu. Mais c'est toujours aussi savoureux, tendre, mignon tout plein... et désopilant!

Extrait:

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(p. 12)

 

Les autres épisodes: "La vraie vie (Le retour à la terre, tome 1)", "Les projets (Le retour à la terre, tome 2)", "Le vaste monde (Le retour à la terre, tome 3)" et "Les révolutions (Le retour à la terre, tome 5)"

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21 septembre 2009

C'est la pleine floraison... (6)

En ce jour de rentrée académique et d'activité débordante, c'est le moment de se replonger une dernière fois dans la tranquillité des mois d'été et toute la variété des couleurs d'un pré fleuri...

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Pré fleuri à l'orée du bois de Lauzelle, Louvain-la-Neuve (Cliché Fée Carabine)

C'est la pleine floraison (1), (2), (3), (4) et (5)

20 septembre 2009

Deux artistes révolutionnaires

"Diego et Frida" de Jean-Marie Gustave Le Clézio41JXQAJGZYL__SL160_AA115_
3 ½ étoiles

Gallimard/Folio, 1997, 309 pages, isbn 2070389448

Les fidèles lecteurs de Jean-Marie Gustave Le Clézio le savent bien – depuis "Le rêve mexicain ou la pensée interrompue", "Ailleurs", "Révolutions" ou plus récemment "Ourania" -, le Mexique fait partie des lieux chers à son coeur, et les paysages, l'histoire et la culture de ce pays lui ont inspiré quelques pages magnifiques. Il n'y a donc rien de surprenant à ce que l'écrivain français se soit penché sur deux des figures les plus marquantes de la création artistique du XXème siècle au Mexique. Par contre, ce qui m'a bel et bien surprise, c'est l'approche qu'il a choisie: étonnamment sage, distante, par moment convenue et finalement un peu froide.

J'aurais aimé trouver sous la plume de Le Clézio davantage d'empathie, de passion, de feu, bref de vie. Et les quelques pages qu'Antoni Casas Ros a consacrées à Frida Kahlo, dans son recueil de nouvelles "Mort au romantisme" sonnent bien plus juste à mes oreilles, et éclairent bien mieux la personnalité tourmentée de cette artiste et ses relations tempétueuses avec son enfant terrible de mari que les trois cents pages de "Diego et Frida".

C'est donc avec une pointe de déception que j'ai refermé ce livre, qui n'est pas pour autant complètement dénué d'intérêt. Bien au contraire! Car Jean-Marie Gustave Le Clézio a su ici rendre pleinement justice au bouillonnement créateur du Mexique du début du XXème siècle, alors que le pays émergeait à peine de ce qui fut au fond la première vraie révolution sociale – la révolution de 1910, anticipant et préfigurant même la révolution russe –, qu'il redécouvrait ses racines amérindiennes et se faisait terre d'accueil pour les artistes et les intellectuels fuyant l'Espagne franquiste ou l'Allemagne nazie, qui vivifièrent en retour la société mexicaine. Toute la singularité et la profonde originalité de la vie sociale, intellectuelle et artistique de cette période se trouvent ainsi admirablement mises en lumière, peut-être mieux même que dans "Les années avec Laura Diaz" où Carlos Fuentes dresse du Mexique de l'époque un tableau pourtant très vivant et détaillé.

Extrait:

"Il est difficile aujourd'hui, dans un monde laminé par les désillusions, les guerres les plus meurtrières de tous les temps, et par la pauvreté culturelle grandissante, de se représenter le tourbillon d'idées qui enflamment Mexico durant cette décennie qui va de 1923 à 1933. Alors le Mexique est en train de tout inventer, de tout changer, de tout mettre au jour, dans la période la plus chaotique de son histoire, quand, sur la scène politique, se succèdent les régimes, depuis les derniers rituels médiévaux de Porfirio Díaz jusqu'à l'héroïsme révolutionnaire de Lázaro Cárdenas, en passant par les aléas de la politique d'Alvaro Obregón, de Plutarco Elias Calles et de De La Huerta.
Tout est à inventer et tout apparaît durant cette époque fiévreuse: l'art des muralistes au service du peuple – les seuls vrais «romanciers de la Révolution», comme les appelle Miguel Angel Asturias – écrivant sur les lieux publics l'histoire tragique et merveilleuse du continent amérindien; l'art au service de l'éducation, quand les campagnes d'alphabétisation du monde rural utilisent le théâtre de marionnettes, la gravure populaire à la manière de Posada, la comédie de rue, les écoles rurales. L'enthousiasme pour l'ère nouvelle gagne tout le pays. Dans les villages les plus isolés (dans la vallée de Toluca, les steppes du Yucatán, ou le désert de Sonora), les maîtres d'école indigènes fondent des académies de nahuatl, de maya, de yaqui, éditent des journaux, des lexiques, des recueils de légendes. La peinture naïve – non pas celle des chapelles et des marchands de tableaux, mais comme plus tard en Haïti ou au Brésil, la peinture née dans les champs et dans la rue – éclate comme un feu d'artifice dans une fête: elle pénètre et force la peinture officielle, apporte ses formes, ses visions nouvelles, une façon inédite d'embrasser le monde, de rendre sa pureté à la culture. La révolution fauve et cubiste qui avait un instant attiré les grands peintres de la modernité est balayée au Mexique par cette révolution populaire qui détourne l'art de la culture gréco-romaine, le replonge dans sa réalité contorsionnée du quotidien où les expressions, les symboles, les équilibres et jusqu'aux lois de la perspective n'obéissent pas aux mêmes critères."
(pp. 83-85)

Un autre livre de Jean-Marie Gustave Le Clézio, dans mon chapeau: "Ritournelle de la faim"

18 septembre 2009

Intéressant...

019167"Esther Kahn" d'Arnaud Desplechin,
avec Summer Phoenix et Ian Holm

Dernier film visionné cet été dans le cadre de l'écran total, "Esther Kahn" du cinéaste français Arnaud Desplechin (qui s'était aussi vu offrir par l'Arenberg une carte blanche, laquelle m'avait permis de découvrir "Maris et femmes" de Woody Allen) nous entraîne dans une ville de Londres grisâtre et enfumée pour y suivre le parcours d'Esther Kahn (une excellente Summer Phoenix), jeune fille née dans une famille juive aussi exubérante que pauvre, et qui n'aspire qu'à un seul but: devenir comédienne. La chose n'était pas plus facile au XIXème siècle qu'aujourd'hui, et la route d'Esther sera semée d'embûches mais aussi éclairée par les leçons d'art dramatique que lui prodigue son mentor, un vieux comédien incarné par Ian Holm - leçons qui sont aussi le prétexte à une réflexion sur le théâtre, l'illusion, l'art et la vie...

Le sujet a de quoi fasciner, et le traitement qu'en donne Arnaud Desplechin surprend par son caractère très statique que vient encore renforcer un commentaire en voix off. Même si le plus surprenant reste sans doute la musique d'Howard Shore, qui aurait sans doute fort bien convenu à la bande-son des aventures de Jason Bourne, ou à l'adaptation de l'un ou l'autre roman de John Le Carré mais qui tombe ici comme un cheveu sur la soupe. Ce décalage était peut-être délibéré, mais il ne m'a pas du tout convaincue! Et au final, "Esther Kahn" est un film qui certes étonne, désarçonne, et donne à réfléchir, mais dont le bien qu'on peut en dire s'énonce comme de soi-même du bout des lèvres. Un film intéressant, en somme, plutôt que franchement enthousiasmant.

17 septembre 2009

La vieille ville - Carnet de Stockholm (2)

43793803_p"Gamla Stan",
Stockholm

Implanté sur les îlots de Stadsholmen et de Riddarholmen, entre le lac Mälar et la mer Baltique, le plus vieux quartier de Stockholm, fondé par Birger Jarl en 1255, est aujourd'hui largement colonisé par les boutiques de souvenirs pour les touristes et les restaurants. Le pire y côtoie le meilleur, et le mauvais goût international y joue au coude à coude avec les jolis petits chevaux de Dalécarlie et les tissus très colorés de Gudrun Sjödén.

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Une ruelle de Gamla Stan, Stockholm (Cliché Fée Carabine)

Mais les ruelles étroites de Gamla Stan n'ont pourtant rien perdu de leur charme: en dépit de la foule qui s'y presse à certaines heures, il fait toujours bon s'y promener et on y trouve encore quelques oasis de calme, telle l'arrière-cours de la pâtisserie Grillska Konditoriet (je vous recommande le crumble aux myrtilles, servi tiède avec son petit pot de crème fraîche parfumée à la vanille - un délice!), sur la place de Storetorget, à deux pas du musée Nobel et tout juste à l'opposé des anciennes maisons des commerçants de la Hanse qui arrivent sans aucun doute en tête au hit-parade des cartes postales de la ville!

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Les anciennes maisons des marchands de la Hanse, Storetorget, Stockholm (Cliché Fée Carabine)

Pour en savoir plus au sujet de Stockholm, de sa géographie et de son histoire, on peut se reporter à la page, très complète, qui lui est consacrée sur Wikipedia.

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16 septembre 2009

L'Histoire à distance

"Les années avec Laura Diaz" de Carlos Fuentes51YNA80KBRL__SL160_AA115_
4 étoiles

Gallimard/Du monde entier, 2001, 620 pages, isbn 2070756742

(traduit de l'Espagnol par Céline Zins et José M. Ruiz-Funes)

Detroit, en 1999, un jeune réalisateur travaillant sur une série documentaire consacrée aux muralistes mexicains a la surprise de reconnaître parmi les personnages d'une fresque de Diego Rivera une femme qui lui fut très proche, quand il n'était encore qu'un tout petit garçon et elle déjà très âgée: Laura Diaz, son arrière grand-mère. Et dans la foulée de sa découverte, il en vient "à [se] demander si l'on peut revivre la vie d'une femme morte exactement comme elle l'a vécue, si l'on peut découvrir le secret de sa mémoire, se remémorer les mêmes choses qu'elle." (p. 18)

"Les années avec Laura Diaz" n'est autre que la réponse de Carlos Fuentes à cette question, une tentative de s'infiltrer dans la conscience d'une petite fille puis d'une femme dont la vie fut traversée par la plupart des grands remous de l'histoire du XXème siècle – révolution mexicaine de 1910, guerre civile espagnole, seconde guerre mondiale, et enfin purges anti-communistes menées par McCarthy aux Etats-Unis -, une petite fille puis une femme dont la vie aussi, dans une société traditionnellement plutôt machiste, fut façonnée par les hommes qu'elle a aimés: père, frère, mari, amants, fils et petit-fils... Pendant une bonne partie de son existence, Laura Diaz semble en effet s'être laissée porter par le courant ou du moins par les décisions et les convictions de ses proches. Certes, elle a eu ses moments de révolte. Il lui est arrivé de dire non, mais ce fut le plus souvent au moment de quitter un courant pour un autre. Et ce n'est que tard dans son parcours et dans le déroulement du récit, qu'elle se découvre une vocation, un engagement ou en d'autres mots un regard tout personnel.

Ce portrait d'une femme, à travers ses longues incertitudes, ses hésitations et les changements parfois profonds que connaît sa personnalité, est sans nul doute très juste d'un point de vue psychologique. Et pourtant, il en résulte pour le lecteur l'impression troublante d'observer l'Histoire à distance, à travers une vitre ou une série de filtres qui l'empêchent à tout instant de se laisser véritablement emporter par ces "années avec Laura Diaz". Un très grand roman, qui me laisse admirative, mais du dehors ou en tout cas du pas de la porte.

Extrait:

"Elle fut surprise de découvrir immédiatement qu'un autre pouvait lui plaire, non pas tant qu'elle puisse plaire à un autre, cela elle pouvait le supposer, son miroir ne se bornait pas à lui renvoyer une image, il la prolongeait d'une ombre de beauté, un spectre parlant qui la poussait – comme en cet instant – à aller au-delà d'elle-même, à pénétrer dans le miroir comme Alice, pour découvrir que chaque miroir cache un autre miroir et chaque reflet de Laura Diaz une autre image qui attend patiemment qu'elle tende la main, la touche et la sente fuir vers le prochain destin..." (pp. 192-193)

Un autre livre de Carlos Fuentes, dans mon chapeau: "Le bonheur des familles"

Carlos Fuentes était l'auteur des mois d'avril et mai 2009 sur Lecture/Ecriture.

14 septembre 2009

"Au jardin de ta gorge..."

Achot

Au jardin de ta gorge, ah!
que ne puis-je entrer
pour y cueillir la pomme!
Au vallon de tes seins,
que ne puis-je m'étendre
pour y fermer les yeux!
Ce vin me griserait
s'il avait ta couleur,
s'il avait ton arôme!
J'en boirais jour et nuit
jusqu'à noyer mon âme...
Que le diable m'emporte!

Nahabed Koutchak, in "Tous les désirs de l'âme (poèmes d'Arménie)", anthologie illustrée de calligraphies d'Achot Achot, Albin Michel/Les carnets du calligraphe, 2002 (traduit de l'Arménien par Vahé Godel)

13 septembre 2009

Atermoiements conjugaux

afte"Maris et femmes" de Woody Allen,
avec Mia Farrow, Judy Davis, Sidney Pollack et Woody Allen

Sorti en salles en 1992, "Husbands and wives" s'inscrit dans la veine new yorkaise et psychanalytique de Woody Allen, qui n'est pas celle que je préfère car elle a donné naissance à quelques opus horriblement bavards et - oui, j'ose - ennuyeux. Je dois donc avouer que j'ai hésité à aller voir ce film-ci, proposé au programme de l'écran total dans le cadre d'une carte blanche accordée au cinéaste français Arnaud Desplechin. Et en fin de compte, je ne regrette pas du tout de l'avoir fait!

Sur le thème ultra-classique des relations conjugales et de leur inextricable sac de noeuds mêlant confort et lassitude, Woody Allen nous offre ici une comédie fort drôle sans - au fond - l'être du tout, et où le comique est plus que tout l'affaire d'un impeccable sens du rythme. Les acteurs - Mia Farrow et Woody Allen, Judy Davis et Sidney Pollack, renforcés par Liam Neeson et Juliette Lewis en seconds rôles - sont parfaits: émouvants, irritants voire insupportables, bref, très humains. Et même si "Husbands and wives" n'est pas devenu mon Woody Allen préféré, je ne me suis pas le moins du monde ennuyée au long de son heure et trois quarts d'heure.

D'autres films de Woody Allen, dans mon chapeau: "Match Point", "Accords et désaccords" et "Whatever works"

10 septembre 2009

L'écrivain en son dernier logis - Carnet de Stockholm (1)

IMG_1360rLe Musée Strindberg,
Drottninggatan, 85
Stockholm

Au retour de quelques jours de vacances à Stockholm, c'est le moment de tourner les pages de mon petit carnet - pour rester dans la couleur locale, disons un de ces jolis cahiers aux couvertures de couleurs vives de chez Ordning & Reda - et de me replonger une dernière fois dans sa moisson d'images, de soleil et de brise marine. Et notre première escale nous emmènera Drottninggatan, dans l'une des rues les plus commerçantes et animées du quartier de Norrmalm.

Au terme de nombreux voyages, le plus turbulent des écrivains suédois du XIXème siècle - j'ai nommé August Strindberg - a en effet posé ses valises dans un petit appartement au quatrième étage de l'immeuble connu sous le nom de la tour bleue, en référence non à la couleur de sa façade - peinte comme souvent à Stockholm dans une jolie teinte ocre -, mais bien au bleu ciel dont se pare sa cage d'escalier. Strindberg y passa les quatre dernières années de sa vie, de 1908 à 1912, entourés de ses livres et des bustes de Goethe et de Schiller qui ornent aujourd'hui encore la salle à manger.

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La salle à manger, Musée Strindberg, Stockholm (Cliché Fée Carabine)

Depuis 1973, son appartement, dont le décor et l'ameublement ont été reconstitués aussi fidèlement que possible, est en effet devenu un musée à la mémoire de l'auteur de "Mademoiselle Julie": un musée d'autant plus émouvant qu'il donne l'impression d'être toujours habité, les livres sur le point d'être feuilletés, les plumes alignées avec un soin presque maniaque d'un côté du bureau prêtes à servir...

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Carl Eldh, Le monument à August Strindberg (détail), Tegnerlunden, Stockholm (Cliché Fée Carabine)

La visite de l'appartement proprement dit est en outre complétée par celle de quelques salles d'exposition, installées dans l'appartement voisin, et évoquant pêle-mêle l'oeuvre graphique d'August Strindberg, qui fut aussi un excellent peintre de paysage, et par le biais de costumes, de maquettes et de photographies de quelques productions récentes de son théâtre. Et une fois franchi le seuil de la tour bleue, pourquoi ne pas tourner à gauche dans Tegnergatan et aller saluer sous les arbres de Tegnerlunden le monument que le sculpteur Carl Eldh a consacré au dramaturge...

Sur la toile, vous pourrez lire aussi une biographie d'August Strindberg, sur Wikipedia [en Français], ainsi que le site du musée Strindberg [bilingue Suédois-Anglais].

Des livres d'August Strindberg, dans mon chapeau: "Mademoiselle Julie" - "Le Pélican" et "Le sacristain romantique de Rånö"

9 septembre 2009

Un plantureux cheese cake à l'Américaine

"Refaire le monde" de Julia Glass41zjHjAuC3L__SL160_AA115_
3 1/2 étoiles

Editions des deux terres, 2009, 767 pages, isbn 978284930602 

(traduit de l'Anglais par Sabine Porte)

Charlotte Greenaway Duquette, en dépit de son nom fleurant bon la Louisiane, est chef-pâtissière à New York où sa petite entreprise est florissante. Et elle mène une vie familiale plutôt heureuse avec son mari, Alan qui est psychothérapeute, et George leur petit garçon de quatre ans - à ceci près que depuis quelques mois, Alan est la proie d'une mélancolie inexpliquée mais de plus en plus affirmée, et qui commence à peser sérieusement à la jeune femme. Aussi, malgré les obstacles pratiques, la proposition inattendue qui lui est faite de devenir chef-cuisinière à la résidence officielle du gouverneur du Nouveau-Mexique, finit par prendre à ses yeux toutes les apparences d'une occasion en or, et pas seulement d'un point de vue professionnel: une occasion rêvée de faire bouger une vie qui menace de s'encroûter dans une situation assez confortable mais pas complètement satisfaisante pour autant.

Comme aux dominos, le coup de tête de Greenie - puisque tel est le surnom que ses intimes donnent à Ms Duquette - amènera de proche en proche bien d'autres changements. Et c'est le début d'un jeu de cloche-merle - façon "Je t'aime, moi non plus" - qui nous tiendra en haleine pendant 760 pages au long desquelles nous aurons aussi bien souvent l'eau à la bouche à l'évocation des somptueuses et savoureuses créations de Greenie. Julia Glass déploie ici un fabuleux talent de conteuse mêlée à un sens affiné du détail révélateur - d'un caractère, d'un état d'esprit ou d'une atmosphère. On s'attache vraiment à des héros très ordinaires dans leurs forces et leurs faiblesses, même si leurs silhouettes semblent parfois évadées du papier glacé d'un magazine "Lifestyle". Et la progression dramatique du récit est si savamment dosée qu'on ne s'ennuie pas une minute.

Je me suis régalée - presque - tout au long de ma lecture de ce gros roman onctueux et riche - un peu trop - à l'égal d'une part de ce plantureux cheese cake dont l'Amérique du Nord a le secret, et j'étais bien tentée d'accorder 4 étoiles à "Refaire le monde"... Jusqu'au deus ex machina final - les attentats du 11 septembre 2001, ben oui... - qui amène chacun des personnages à reconsidérer ses choix et à se fixer enfin à une nouvelle place. Après le monde de couleurs et de saveurs que Julia Glass nous a offert dans les trois premiers quarts de son livre, cela vous a toutes les apparences d'une solution de facilité, d'autant que son traitement de cet événement reste assez convenu et n'apporte rien de neuf. Pour être franche, j'en veux un peu à l'auteur de ne pas s'être montrée plus imaginative pour l'occasion. Mais "Refaire le monde" n'en reste pas moins une très bonne lecture d'évasion.

Extrait:

"Sur ce, on lui apporta la petite gourmandise auréolée de vapeur qui ressemblait davantage à un chapeau marron avachi. Elle respira la vapeur qui s'en dégageait. Celle-ci lui rappela tristement le parfum de l'homme assis à la table d'à côté. Elle le mangea tout de même: lentement et jusqu'à la dernière bouchée. Le soufflé avait la texture de l'amour, suave et aérienne, chaude et humide; le goût n'importait guère." (pp. 543-544)

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